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Le français et ses incongruités

29 Sep

2018

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Écrit Par  Yann Bidon
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Le français et ses incongruités

Quand vous doutez de vous et vous dites que vous ne pourrez jamais le faire, que jamais vous ne pourrez apprendre tout ça, rappelez-vous que vous parlez une langue qui est loin d’être triviale. Sans avoir l’outrecuidance de la désigner comme une des plus difficiles, elle est loin d’être aisée. Nul besoin d’aller chercher des cas tordus et sortir des vieux mots de derrière les fagots pour trouver des cas difficilement explicables. Des mots que l’on utilise pourtant tous les jours ne sauraient être expliquer autrement que par « c’est comme ça ». Leur singularité vient souvent de leur étymologie, de l’évolution de celui-ci, des usages ou encore du « ça sonne bien », il n’en reste pas moins d’en tirer des règles générales est ardu.

Vous ne me croyez pas ? Très bien, pourriez-vous m’expliquer le féminin des mots en -eur alors ? Intuitivement, on me répondra que les mots en -eur ont leur féminin en -euse. Par exemple, un chanteur devient une chanteuse, un menteur, une menteuse, un spectateur une…. Ah mince ! Une exception à cette règle générale ? Mais peut-on vraiment parler d’exceptions lorsqu’il y en a pléthore ? Directeur, directrice, acteur, actrice, amateur, amatrice, éditeur, éditrice et la liste est longue. Comment puis-je savoir si c’est un -euse ou un -trice ? Vous avez dû les apprendre. Il n’y a pas de solutions miracles. En plus, cette règle est loin d’être la seule exception. D’autres formes de féminin des noms en -eur existent et là encore, ce n’est pas des mots exotiques. Au travail, quand votre supérieur devient une supérieure, vous noterez que le -eur devient simplement -eure, faisant écho à la règle générale qui est que pour féminiser un mot, on rajoute un e. De même, si vous avez une fille de moins de 18 ans, sachez que vous avez une mineure. « Mineur » est fourbe car il peut s’écrire de deux façons en fonction du sens qu’on lui prête. Ainsi, une mineure désigne une personne en dessous de l’âge légal. Par contre, une mineuse est une femme qui travaille dans les mines. Ils existent également des noms où la forme féminine garde la forme masculine ou peut aussi prendre la forme -eure comme une professeur(e), une ingénieur(e), une successeur(e), une auteur(e). C’est au choix mais la tendance est à l’ajout du e. Donc un mot en -eur peut donc s’écrire -eure… D’accord… Mais ce n’est pas tout ! Car si, en droit, un défendeur devient une défenderesse, on pourrait me rétorquer que c’est réservé au jargon juridique. Et pourtant, quid de « enchanteur » qui devient « enchanteresse » ? Quid du vengeur qui devient une vengeresse ou encore du pécheur qui devient une pécheresse ? Bien que ces termes soient quand même beaucoup moins usités, je vous l’accorde, il n’en reste pas moins qu’un mot en -eur peut donc devenir -eresse. Ainsi, les noms en -eur peuvent se terminer de moult façons, pourrez-vous me donner une règle pour m’y repérer ? Il y a des explications pour chacun des cas mais en vrai, il n’y a pas de règle générale. Vous avez juste été capable de les apprendre, de les reconnaître et à force de pratiques, à les assimiler. Et depuis, vous le faites naturellement. Le problème se présente juste quand on introduit un terme qui vous est inconnu. Si je vous demande quel est le féminin d’un ravaudeur ou d’un thésaurisateur, ne seriez-vous pas embêtés ? Alors imaginez un étranger qui souhaite apprendre le français, c’est juste un enfer.

Et là, je me suis attardé que sur une règle mais il y en a tellement. Je pourrais en écrire un livre entier sur toutes les incongruités de la langue française. Pour rester dans le thème du passage au féminin, pour passer les mots en -x au féminin, on remplace le x par se comme un époux, une épouse, jaloux, jalouse… On note le son avec un seul s. Et là, on te sort doux, faux, roux… et leur féminin prend ss ou un c. Sans parle du très étrange vieux qui devient vieille. Pareil pour le féminin des mots en -et, on double le t et on ajoute un e comme muet, muette, net, nette, cadet, cadette, maigrelet, maigrelette… Sauf qu’on a complet, complète, discret, discrète, inquiet, inquiète, secret, secrète…. Et que dire des « fonctions/rôles/états » genrés qui sont des mots qui changent énormément voire totalement comme un père, une mère, un lièvre, une hase, un jar, une oie, un empereur, une impératrice, un serviteur, une servante, un dieu, un déesse. Il n’y a pas de règles miraculeuses, ce n’est pas simple. Mais vous avez su maîtriser ça donc ne sous-estimez jamais vos capacités !

De même, un soucis qu'on traite naturellement, mais qui est assez difficile pour les étrangers, est « comment détermine-t-on qu'un nom est masculin ou féminin ? » Quand c'est genré, c'est compréhensible. Un homme, une femme. Simple. Mais pourquoi une lampe mais un lampadaire ? Pourquoi une rue, une avenue mais un boulevard. Surtout que ce n'est pas un problème de sonorité tant on dit bien une boule. Nous n'avons pas d'articles neutres en français que l'on pourrait mettre pour les objets et autres éléments non genrés. Donc il nous faut bel et bien trancher pour chaque mot s'il est féminin ou masculin. Mais encore une fois, il n’y a pas de règle générale. Vous avez dû apprendre cela par cœur. Et finalement, vous vous en sortez bien.

Toutefois, ne tapons pas que sur le féminin des mots, on risquerait d’énerver les plus féministes d’entre vous. D’autant qu’il n’y a pas que là où c’est ardu. Mais le but est de vous montrer que vous ne devez jamais douter des capacités de votre mémoire et de votre cerveau. Vous avez déjà été en mesure d’apprendre des règles et des milliers d’exceptions. Alors quand vous voulez retenir des trucs, ne vous inquiétez pas, vous en avez totalement les capacités. « Oui mais on ne comprend pas forcément ce qu’on doit apprendre, c’est donc compliqué ». Oui, il est toujours mieux de comprendre ce que l’on veut retenir pour réellement l’apprendre. Après, vous utilisez en français des mots qui font sens, que vous comprenez globalement mais dont vous êtes incapable d’expliquer ce qu’ils veulent dire exactement ou d’où ils viennent. Si, je vous assure ! Et bien que je pourrais vous sortir le verbe chaloir qu’on retrouve dans « peu me chaut », pas besoin de déterrer de vieilles expressions plus trop utilisées pour cela. Par exemple, quand vous apprenez au fur et à mesure, pouvez-vous me dire ce qu’est le « fur » ? Fur signifie proportion. Dans votre for intérieur, vous êtes d’accord avec moi. Cool, mais c’est quoi « for » ? C'était un tribunal ecclésiastique où l'on donne un jugement moral. Vous êtes issu d’une famille mais issu, c’est le participe passé de quel verbe ? Pour information, c’est le verbe issir. Donc bon ! Visiblement, ça n’a pas l’air de vous déranger de ne pas savoir, du moment que vous êtes compris et que vous comprenez globalement ce que c’est.

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